Voyage au centre d’une étoile naine blanche

Un cœur stellaire défiant les prédictions : voici ce que dévoile la première cartographie de l’intérieur d’une étoile naine blanche réalisée par une équipe internationale menée par une jeune chercheuse de l’Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie de Toulouse ainsi que trois chercheurs du Centre de recherche en astrophysique du Québec de l’Université de Montréal. Cette avancée va permettre de mieux comprendre les mécanismes physiques impliqués dans l’évolution des étoiles et de notre Soleil. Ce résultat est publié dans la revue Nature à partir du 8 Janvier 2018.

C’est en exploitant les données du satellite Kepler de la NASA sur les pulsations de l’étoile KIC 08626021 qu’une équipe internationale d’astrophysiciens, menée par Noemi Giammichele, une jeune  chercheuse de l’Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie (IRAP) de Toulouse, en collaboration avec les professeurs Gilles Fontaine et Pierre Bergeron ainsi que le chercheur Pierre Brassard du Centre de recherche en astrophysique du Québec (CRAQ) de l’Université de Montréal, a dressé la cartographie de la composition interne d’une naine blanche, successeur lointain d’une étoile semblable à notre Soleil. Les oscillations de luminosité observées à la surface de cette étoile ont pu être déchiffrées au moyen de techniques « astérosismologiques », analogues aux méthodes qu’emploient les géophysiciens pour étudier la structure de notre planète grâce aux ondes sismiques provoquées par les tremblements de Terre.

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Illustration 1 : Les tremblements d’étoile génèrent des vibrations se propageant parfois jusqu’au cœur de l’astre, comme ici pour la naine blanche KIC08626021 (Crédit : Stéphane Charpinet).

Les étoiles naines blanches sont les reliques des cœurs de près de 97% des étoiles de l’Univers. Ces véritables fossiles stellaires conservent précieusement en leur sein l’empreinte des processus physiques passés, tels que le brûlage nucléaire et les épisodes de mélange convectif, phénomènes toujours très incertains dans les modélisations actuelles des théories d’évolution stellaire. Obtenir une vue claire de la composition de ces étoiles permettra donc de mieux déchiffrer les phénomènes en jeu lors des phases antérieures de leur évolution.

Au cours de leur lente agonie de naine blanche, durant laquelle elles se refroidissent inexorablement, ces étoiles passent par des phases d’instabilité ou elles se mettent à vibrer. Ces profondes vibrations – ou tremblements d’étoile – sont les clés permettant de lever le voile sur l’intérieur même de ces résidus stellaires. La stratification chimique interne de la naine blanche génère une signature unique sur les modulations lumineuses émergeant de l’étoile qui, une fois déchiffrée, permet d’en cartographier la structure.

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Illustration 2 : De KIC08626021, une naine blanche à peine plus grande que la Terre située à 1375 années-lumière aux limites des constellations du Cygne et de la Lyre, ne nous parvient qu’un très faible éclat. Pourtant d’infimes vibrations – des tremblements d’étoile – ont pu être mesurées avec une grande précision à sa surface. Ces séismes nous dévoilent pour la première fois les mystères enfouis au cœur même de ces fossiles stellaires (Crédit : Stéphane Charpinet).

Et que dévoile-t-on du plus profond de ces étoiles? Non seulement un cœur nettement plus grand et plus riche en oxygène que prédit, mais également le profil de distribution des principaux éléments chimiques présents. Cette découverte offre ainsi un banc d’essai d’une grande précision pour calibrer finement les processus physiques de brûlage nucléaire et de mélange convectif à l’œuvre dans la plupart des étoiles, en particulier durant les phases d’évolution stellaire pré-naine blanche. Une connaissance précise de la composition chimique interne des naines blanches est également précieuse pour les utiliser comme « chronomètres cosmiques » destinés à la datation des populations stellaires constituant notre Galaxie.

Article à paraître dans Nature :

« A large oxygen-dominated core from the seismic cartography of a pulsating white dwarf » N. Giammichele, S. Charpinet, G. Fontaine, P. Brassard, E.M. Green, V. Van Grootel, P. Bergeron, W. Zong, & M.-A. Dupret. DOI: 10.1038/NATURE25136

Source et renseignements :

Dr. Noemi Giammichele
Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie de Toulouse
Téléphone : 001(438) 887-4432 (actuellement à Montréal, Canada, 6h de décalage horaire)
noemi.giammichele@irap.omp.eu

Noemi Giammichele jouit présentement d’une bourse postdoctorale du FRQNT (Québec) à l’IRAP de Toulouse. Elle a obtenu son doctorat en 2016 sous la direction conjointe du Professeur Gilles Fontaine et du Dr. Pierre Brassard à l’Université de Montréal, tous deux membres du Centre de recherche en astrophysique du Québec.

Professeur Gilles Fontaine
Centre de recherche en astrophysique du Québec
Université de Montréal
Téléphone : (514) 343-6680
fontaine@astro.umontreal.ca

Robert Lamontagne
Responsable des relations avec les médias
Centre de recherche en astrophysique du Québec
Université de Montréal
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