Une étude de l’exoplanète TRAPPIST-1 b menée par l’UdeM dévoile de nouveaux détails sur son atmosphère et son étoile
Une équipe d’astronomes menée par des chercheurs et des chercheuses du Centre de recherche en astrophysique du Québec (CRAQ) a fait une avancée importante dans notre compréhension de l’intrigant système exoplanétaire TRAPPIST-1. Leurs recherches ont non seulement permis de mieux comprendre la nature de TRAPPIST-1 b, l’exoplanète qui orbite le plus près de l’étoile du système, mais elles ont également montré l’importance des étoiles parentes dans l’étude des exoplanètes. Les résultats, publiés dans la revue Astrophysical Journal Letters, mettent en lumière l’interaction complexe entre l’activité stellaire et les caractéristiques des exoplanètes.
Cette représentation artistique de l’étoile naine rouge TRAPPIST-1 met en évidence sa nature très active. L’étoile semble avoir de nombreuses taches stellaires (des régions plus froides de sa surface, semblables aux taches solaires) et des éruptions. L’exoplanète TRAPPIST-1 b, la planète la plus proche de l’étoile du système, est visible au premier plan, sans atmosphère apparente. L’exoplanète TRAPPIST-1 g, l’une des planètes de la zone habitable du système, est visible à l’arrière-plan, à droite de l’étoile. Le système TRAPPIST-1 contient sept exoplanètes de tailles semblables à celle de la Terre.
Crédit : Benoît Gougeon, Université de Montréal
Un système exoplanétaire prometteur
TRAPPIST-1, une étoile beaucoup plus petite et plus froide que notre Soleil située à environ 40 années-lumière de la Terre, attire l’attention des scientifiques et des amateurs de l’espace depuis la découverte de ses sept exoplanètes de la taille de la Terre en 2016. Ces mondes, tous très rapprochés de leur étoile et dont trois se trouvent dans sa zone habitable, ont alimenté l’espoir de trouver des conditions potentiellement habitables au-delà de notre Système solaire.
Olivia Lim, doctorante à l’Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes à l’Université de Montréal, a dirigé l’équipe qui a étudié l’exoplanète TRAPPIST-1 b et son étoile en utilisant les toutes premières données spectroscopiques du système TRAPPIST-1 prises par le télescope spatial James Webb. Crédit : Amélie Philibert, Université de Montréal
Une équipe de recherche, dirigée par Olivia Lim de l’Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes (iREx) de l’Université de Montréal (UdeM) et membre du CRAQ, a utilisé le puissant télescope spatial James Webb (JWST) pour observer l’exoplanète TRAPPIST-1 b. Ces observations ont été recueillies dans le cadre du plus important programme d’observateurs généraux (GO) dirigé par le Canada au cours de la première année d’exploitation du JWST. Ce programme comprenait également l’observation de trois autres planètes du système, TRAPPIST-1 c, g et h. TRAPPIST-1 b a été observée lors de deux transits, c’est-à-dire le moment où la planète passe devant son étoile, à l’aide de l’instrument canadien NIRISS à bord du JWST.“Il s’agit des toutes premières observations spectroscopiques d’une planète de TRAPPIST-1 obtenues par le JWST, et nous les attendions depuis des années!“, s’exclame Olivia Lim, chercheuse principale de cet important programme GO.
L’étude a utilisé la technique de la spectroscopie de transmission pour obtenir des informations importantes sur les propriétés de ce monde lointain. En analysant la lumière de l’étoile centrale après qu’elle ait traversé l’atmosphère de l’exoplanète lors d’un transit, les astronomes peuvent voir l’empreinte unique laissée par les molécules et les atomes présents dans cette atmosphère.
“Il ne s’agit que d’un petit sous-ensemble des nombreuses observations de ce système planétaire unique qui doivent encore être réalisées et analysées”, ajoute René Doyon, chercheur principal de l’instrument NIRISS et co-auteur de l’étude. “Ces premières observations mettent en évidence la puissance de NIRISS et du JWST en général pour sonder les atmosphères minces autour des planètes rocheuses”.
Connaître son étoile, connaître sa planète
La principale conclusion de l’étude est l’impact significatif de l’activité et de la contamination stellaires lorsqu’il s’agit de déterminer la nature d’une exoplanète. La contamination stellaire désigne l’influence des caractéristiques propres à l’étoile, telles que les taches sombres et les plages brillantes (nommées “facules”), sur les mesures de l’atmosphère de l’exoplanète.
L’équipe a trouvé des preuves irréfutables que la contamination stellaire est un facteur incontournable dans l’analyse des spectres de transmission de TRAPPIST-1 b et, sans doute, des autres planètes du système. L’activité de l’étoile centrale peut créer des “signaux fantômes” qui peuvent tromper l’observateur en lui faisant croire qu’il a détecté une molécule particulière dans l’atmosphère de l’exoplanète. Ce résultat souligne l’importance de prendre en compte la contamination stellaire lors de la planification des futures observations de tous les systèmes exoplanétaires. Ceci est particulièrement vrai pour les systèmes comme TRAPPIST-1, puisque le système est centré autour d’une étoile naine rouge qui peut être particulièrement active avec des taches stellaires et des éruptions fréquentes.
“En plus de la contamination par les taches stellaires et les facules, nous avons observé une éruption stellaire, un événement imprévisible au cours duquel l’étoile devient plus brillante pendant plusieurs minutes ou plusieurs heures”, explique Olivia Lim. “Cette éruption a affecté notre mesure de la quantité de lumière bloquée par la planète. De telles signatures de l’activité stellaire sont difficiles à modéliser, mais nous devons en tenir compte pour être sûrs d’interpréter correctement les données.”
Pas d’atmosphère significative sur TRAPPIST-1 b
Si les sept planètes de TRAPPIST-1 ont été des candidates séduisantes dans la recherche d’une Terre 2.0, une exoplanète semblable à notre Terre, la proximité de TRAPPIST-1 b avec son étoile signifie qu’elle se trouve dans des conditions plus difficiles que ses consoeurs. Elle reçoit quatre fois plus de rayonnement stellaire que la Terre et sa température de surface se situe entre 120 et 220 degrés Celsius. Cependant, si TRAPPIST-1 b avait une atmosphère, elle serait la plus facile à détecter et à caractériser de toutes les cibles du système. TRAPPIST-1 b étant la planète la plus proche de son étoile et donc la plus chaude du système, son transit crée un signal plus fort. Tous ces facteurs font de TRAPPIST-1 b une cible d’observation importante, mais posant un défi considérable.
Pour tenir compte de l’impact de la contamination stellaire, l’équipe a procédé à deux extractions atmosphériques indépendantes, soit des techniques permettant de déterminer le type d’atmosphère présent sur TRAPPIST-1 b sur la base des observations. Dans la première approche, la contamination stellaire a été supprimée des données avant leur analyse. Dans la seconde approche, la contamination stellaire et l’atmosphère planétaire ont été modélisées et ajustées simultanément. Dans les deux cas, les résultats ont indiqué que les spectres de TRAPPIST-1 b pouvaient bien correspondre à la contamination stellaire modélisée sans autres facteurs. Cela suggère qu’il n’y a pas de preuve d’une atmosphère significative sur la planète. Un tel résultat est fondamental, car il indique aux astronomes quels types d’atmosphères sont incompatibles avec les données observées.
Sur la base des observations recueillies par le JWST, Olivia Lim et son équipe ont exploré une série de modèles atmosphériques pour TRAPPIST-1 b, en examinant diverses compositions et divers scénarios possibles. Ils ont constaté que les atmosphères sans nuages et riches en hydrogène étaient exclues avec un degré de confiance élevé. Cela signifie qu’il ne semble pas y avoir d’atmosphère claire et étendue autour de TRAPPIST-1 b. Cependant, les données n’ont pas permis d’exclure avec certitude des atmosphères plus fines, telles que celles composées d’eau pure, de dioxyde de carbone ou de méthane, ni une atmosphère similaire à celle de Titan, une lune de Saturne et la seule lune du Système solaire à posséder sa propre atmosphère. Ces résultats correspondent bien avec ceux des observations précédentes de TRAPPIST-1 b (photométriques, et non spectroscopiques) effectuées par le JWST (Greene, et al. et Ih, et al.) à l’aide de l’instrument MIRI. En outre, l’étude a prouvé que l’instrument canadien NIRISS est un outil très performant et sensible, capable de sonder les atmosphères des exoplanètes de la taille de la Terre à des niveaux impressionnants.
Les nouvelles connaissances acquises grâce à cette étude ont permis aux scientifiques d’approfondir leur compréhension du système TRAPPIST-1 et de souligner la nécessité d’effectuer davantage d’observations et de recherches approfondies qui tiennent compte à la fois de la contamination stellaire et de l’atmosphère des planètes. Alors que les astronomes continuent d’explorer les vastes étendues de l’espace, ces résultats guideront les futurs programmes d’observation du JWST et d’autres missions, et contribueront à une meilleure compréhension des atmosphères exoplanétaires et de leur habitabilité potentielle.
À propos de l’étude
L’article “Atmospheric Reconnaissance of TRAPPIST-1 b with JWST/NIRISS: Evidence for Strong Stellar Contamination in the Transmission Spectra” a été publié dans la revue Astrophysical Journal Letters le 22 septembre, 2023. L’auteure principale est Olivia Lim, doctorante à l’Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes de l’Université de Montréal (UdeM) et membre du CRAQ. Les autres chercheurs du CRAQ qui ont contribué à cet article sont Björn Benneke (UdeM), René Doyon (UdeM), Caroline Piaulet (UdeM), Étienne Artigau (UdeM), Louis-Philippe Coulombe (UdeM), Michael Radica (UdeM), Alexandrine L’Heureux (UdeM), Loïc Albert (UdeM), Salma Salhi (UdeM et Université de Calgary), Pierre-Alexis Roy (UdeM), Marylou Fournier-Tondreau (UdeM), Jake Taylor (UdeM et Université d’Oxford), Neil Cook (UdeM), David Lafrenière (UdeM), Nicolas Cowan (Université McGill), Jason Rowe (Université Bishop’s), Lisa Dang (UdeM), et Antoine Darveau-Bernier (UdeM). D’autres contributeurs sont basés à l’Université du Michigan, au MIT, à l’Université Cornell, au STScI, et à l’Université Johns Hopkins.
Pour en savoir plus
Article scientifique sur ApJL
Article scientifique sur arXiv
Contacts scientifiques
Olivia Lim
Doctorante
Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes
Université de Montréal
olivia.lim@umontreal.ca
René Doyon
Directeur
Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes
Université de Montréal
rene.doyon@umontreal.ca
Tél: 514 349-5779
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Responsable des relations avec les médias
Centre de recherche en astrophysique du Québec
frederique.baron@umontreal.ca
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Scientifique chargée des communications, JWST
Institut Trottier de recherche sur les exoplanètes
Université de Montréal
nathalie@astro.umontreal.ca
Tél: 613 531-1762