Des températures étrangement semblables sur la face obscure des exoplanètes
Selon une nouvelle étude, l’hémisphère non éclairé des Jupiter chaudes se distingue par ses nuages de minéraux
Figure : Schéma des nuages du côté nocturne d’une exoplanète de type Jupiter-chaude. La température de l’atmosphère sous-jacente est supérieure à 800 °C, suffisamment chaude pour vaporiser les roches. Les mouvements atmosphériques provenant de l’atmosphère profonde ou du côté plus chaud amènent la vapeur de roche dans des régions plus froides, où elle se condense en nuages et peut-être même sous forme de pluie dans l’atmosphère. Ces nuages de roche condensée bloquent les radiations thermiques sortantes, ce qui donne au côté non-éclairé de la planète une apparence relativement fraîche.
Une étude menée par des astronomes de l’Université McGill et membres du Centre de recherche en astrophysique du Québec (CRAQ), révèle que la température de la face obscure de diverses Jupiter chaudes est étonnamment uniforme, ce qui laisse croire que ces planètes gazeuses géantes possèdent des nuages faits de minéraux et de roches.
S’appuyant sur les données recueillies par les télescopes spatiaux Spitzer et Hubble, les chercheurs de l’Institut spatial de McGill ont en effet mesuré sur la face obscure des douze astres sondés une température d’environ 830 °C.
Les Jupiter chaudes se caractérisent par un hémisphère éclairé constamment tourné vers leur étoile hôte et une face obscure en permanence plongée dans le noir. Le phénomène reproduit le rapport entre la Terre et la Lune, dont nous apercevons toujours la même face. Pourtant, les scientifiques avaient déjà mesuré des températures nettement plus élevées du côté non éclairé des Jupiter chaudes, sans doute en raison de transferts d’énergie d’un hémisphère à l’autre.
« Les modèles de circulation atmosphérique prévoyaient des variations de température nettement plus marquées sur les faces obscures, explique Dylan Keating, doctorant en physique dirigé par le professeur Nicolas Cowan de l’Université McGill. Considérant que les planètes que nous avons observées étaient irradiées à divers degrés par leur étoile hôte et qu’on notait des écarts de température de presque 1 730 °C entre leurs faces diurnes, ces résultats sont fort surprenants. »
Dylan Keating, auteur principal d’un nouvel article de Nature Astronomy exposant les conclusions de l’étude, estime que les températures sur la face obscure sont probablement attribuables à la condensation de roche vaporisée, qui se produit dans ces atmosphères très chaudes.
« L’uniformité enregistrée suggère que les nuages présents de ce côté ont une composition similaire, note-t-il. Nos données indiquent qu’ils sont probablement formés de minéraux comme le sulfure de manganèse et les silicates, c’est-à-dire de roches. »
D’après Nicolas Cowan, comme les principes physiques de base expliquant la formation des nuages sont invariables, étudier ceux qui enveloppent la face obscure des Jupiter chaudes pourraient nous en apprendre davantage sur le processus ailleurs dans l’Univers, y compris sur Terre. Quant à M. Keating, il est d’avis que les prochaines missions de télescopes spatiaux – comme le James-Webb ou ARIEL, de l’Agence spatiale européenne – pourraient servir à mieux définir la composition et le mode de formation de ces nuages, et à parfaire les modèles de circulation atmosphérique sur ces planètes.
« En observant des Jupiter chaudes à des longueurs d’onde plus courtes et plus longues, nous arriverons à caractériser les nuages de leur face obscure », précise-t-il.
L’article « Uniformly hot nightside temperatures on short-period gas giants », par Dylan Keating et coll., a été publié dans la revue Nature Astronomy.
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